Bouche à bouche

Qui dit juillet...dit soleil?...non je déconne!
Qui dit juillet dit vacances.
Qui dit vacances dit voyage.
Qui dit voyage dit dépaysement.
Qui dit dépaysement dit découvertes.
Qui dit découvertes dit rencontres.
Qui dit rencontres dit...communication
Qui dit communication dit... "Aïe ame sorri...canne you ripiiit...Aïe donte undeurstaaand...Aïe ame french!"

Et pour tout être humain qui se respecte, la dernière partie de la phrase est certainement l'argument le plus logique.
Du peu que j'en sache (c'est à dire vraiment pas beaucoup, car je ne suis ni touriste, ni prof, ni linguiste, ni prof de linguistique touriste) les français sont mondialement reconnus comme étant incapables de s'exprimer dans une autre langue que la leur.
Quant à ce constat, plusieurs hypothèses:
a) Les français sont nombrilistes. Ils sont convaincus que leur langue est plus belle et plus intéressante que celles des autres et refusent donc de se soumettre à l'apprentissage. D'ailleurs, pourquoi le feraient-ils? Paris est la première destination touristique mondiale (si mes sources ne sont pas erronées) et ce serait plutôt à tous ces envahisseurs étrangers de faire quelques efforts! (non mais merde, à la fin!).
b) Leur cerveau de petits français fragiles est incapables d'assimiler les bases d'une communication nouvelle. Ils n'y peuvent rien, c'est physiologique.
c) La méchante fée Babel s'est penchée sur le berceau de l'humanité et a décrété "Français, je ne vous ai pas compris! Puisque votre grammaire me pompe l'air, vous serez condamnés à ne pas maîtriser celle de vos voisins".
d) En fait...en fait...euh....en fait....c paske les politik et les journaliste dans la télé, i' cause telement mal qon c plu comment qon doigt fer...en fait...pr dire correktemen bi1 d truc... avec not' parlé à nous mé aussi avec c'ui d autre P.I...
e) Il y a quelque chose de pourri dans la démocratie participative de l'enseignement des langues vivantes!
Je ne ferai pas durer le suspense plus longtemps: je penche d'emblée pour la dernière solution.

D'aucuns vous diront, qu'en tant que mauvaise citoyenne du monde, j'essaye grossièrement de me trouver des excuses. Qu'en réalité, je suis une méchante grosse feignasse qui dessinait pendant les cours d'espagnol et dormait pendant ceux d'anglais (oui, que voulez-vous? j'ai le parcours typique de la mauvaise élève: LV1 anglais LV2 espagnol; "What a shame!!!" dirais-je en allemand si cette langue m'était familière).
Eh bien rien n'est plus faux.
Tout du moins, je ne laisserait personne affirmer que je suis arriver en 6e les mains dans les poches en soutenant à qui voulait bien l'entendre que jamais je ne voyagerai et que donc "rien à péter de la langue de c'connard de Shakespeare!" Onze ans, c'est parfois un peu tôt pour jouer les rebelles de la mort contre la société.
Donc, non, que cela soit dit et bien dit: j'ai toujours été une élève studieuse. Moyenne, certes, mais consciencieuse. J'irai même jusqu'à dire que, comme beaucoup de mes camarades, j'avais très envie d'apprendre d'autres langues et étais à cet instant convaincue qu'à 14 ans, je serai capable de tenir une discussion en anglais et à 18, de constituer un dossier de cinquante pages dans cette même langue sur la Liberté en philosophie.
Que nenni! J'en ai six de plus et ne me rappelle même plus de mes verbes irréguliers (que j'ai pourtant passé sept ans à ingurgiter).
Comment expliquer que la plupart des individus (non français) parviennent à apprendre les bases indispensable de la communication en trois ans et que nous, en quasiment une décennie de bourrage de crâne intensif, nous soyons toujours incapables de passer une commande dans un restaurant viennois? (si ça sent le vécu, c'est que c'est peut-être bien le cas).
Cette question, je remercie une amie de l'avoir mise en lumière hier soir (coucou!).
J'ai eu beau la passer en revue une bonne partie de la nuit, je n'arrive pas à m'en dépêtrer.

Comme vous l'avez deviné précédemment, j'en arrive à la conclusion suivante: les français n'ont pas, sous prétexte qu'ils sont français, un chromosome linguistique en moins. On a beau avancer encore et toujours l'âge de l'initiation aux langues, ils n'en demeurent pas moins "mauvais". On a beau les interroger et remarquer de bons potentiels à l'écrit, une langue, avant tout chose, ça se parle et pour ce qui est de parler, 80% des français en sont toujours aux balbutiements. Prenons pour exemple ma gentille maman (ça fera plaisir à un de mes lecteurs...coucou aussi!). Studieuse elle aussi (c'est de famille), elle n'a témoignée aucune difficulté pour l'apprentissage des langues. Pourtant, à présent, elle n’identifie pas l'anglais quand elle l'entend et le lit pourtant parfaitement. De même, elle n'a retenu de ses cours d'allemand qu'une seule phrase préconçue: "Pardonnez moi d'être arrivée en retard"(mais à part ce détail, je vous assure, c'est une élève modèle).
Allez, vous aussi, vous le touchez du doigt le problème qui est le notre depuis cinquante ans d'instruction!

1) Nous apprenons une langue sur les bases de l'écrit. Hors, une langue, pour qu'elle serve à quelque chose, doit se parler, s'entendre, s'échanger.
2) Notre façon d'apprendre est systématique, pas réfléchie. Nous nous attachons trop à conserver la beauté d'une langue, sa subtilité. Nous faisons du mot-à-mot, du grammaticalement correcte et nous répétons inlassablement des phrases toutes faites, lues ou entendues (Where is Brian? Brian is in the kitchen!!!) Nous sommes donc incapables de raisonner dans cette langue, de créer des phrases par nous même. En deux mots: nous imitons!
3) Nous sommes victimes de la rigueur et de la célèbre difficulté de notre propre langue. Puisqu'il ne FAUT SURTOUT PAS se tromper entre le futur et le conditionnel et toujours accorder CORRECTEMENT les compléments, nous appliquons cette philosophie exemplaire à tout ce que nous enseignons.
Ouf! Je sens qu'après tout ça, je serai un peu moins honteuse de mes médiocres capacités.

En effet, les conséquences de cette éducation ne se font pas attendre. Nous refusons pour la plupart de nous exprimer dans une langue que nous savons mauvaise. En définitive, l'important, ce n'est pas de faire des phrases irréprochables mais bien d'être compris. Cette notion même est cruellement bafouée lors de nos cours de langue. Je ne dis pas ça pour me venger de mes professeurs tortionnaires. Au contraire, certains d'entre eux étaient parfaits sur le plan humain. Ils sont juste les victimes collatérales d'une méthode défaillante.
Désormais, comme beaucoup, je "souffre" des lacunes de notre système. Je n'ai jamais fait l'objet d'échange scolaire ou de séjour prolongé à l'étranger afin d'apprendre réellement une langue (une semaine de vacances par-ci, par-là, c'est peu pour progresser), de m'y plonger et d'avoir la chance absurde de me tromper en beauté. Je suis pour ainsi dire codépendante à chaque voyage. Pourtant, je bous de me lancer dans la grande aventure de la communication internationale, mais je ne peux m'y résoudre par crainte de ne pas être comprise ou de faire une minuscule erreur. Demander le prix de tel objet me réclame beaucoup d'énergie et de concentration. Répéter inlassablement la réponse de manière différente réclame à mon interlocuteur des trésors de patience et me ramène toujours à la case départ: les bancs de l'école. Humiliant!

On a eu beau nous dire "c'est pas grave si vous vous trompez, l'important c'est de participer", rien n'est plus faux. Combien d'entre nous se sont entendus rétorquer après une intervention regrettable: "Si c'est pour dire ce genre de bêtises, tu ferais bien mieux de te taire!"
Alors du coup, même à l'âge adulte, nous obéissons sagement. En refusant de pratiquer une autre langue, nous ne faisons que ce que l'on nous a demandé: nous nous taisons.

Commentaires

  1. tu write toujours aussi very good my friend, les prochaines vacances nous irons toutes les deux faire de la randonnée en Irlande voir comment on s'en sort!!

    nip-nip

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  2. Merci, chouchounou, ce compliment m'enduit le cœur d'un baume rafraichissant (très agréable, par cette chaleur!). Et, oui, je suis d'accord, on peut le faire!

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