Titanic ?

Je vais rarement au cinéma. Pourtant, je regarde pas mal de dvds et je suis, pour ainsi dire, membre de la génération télé. Mais, à défaut d’être une cinéphile avertie, je demeure très critique, aussi ai-je fini par me limiter aux films que j’ai loupé lors de leurs sorties, à quelques émissions pas trop tartes, et aux (re)diffusions de mes séries préférées.
En gros, j’emprunte, j’achète, j'échange et, à l’occasion, je me fais une petite virée au MK2 le plus proche (ceci n’est pas un message publicitaire).
En moyenne une fois par mois, je profite ainsi du réjouissant spectacle d’un film sélectionné avec soin, projeté sur grand écran et à plein volume.

Enfin, disons plutôt qu’en théorie, cela devrait arriver, une fois par mois. Je devrais décortiquer soigneusement le programme, dégotter LE film qui me tente et m'y ruer un dimanche, un lundi, ou un soir de semaine pour me remettre de mes émotions de la journée. Oui, je devrais trouver quelque chose à aller voir. Ce serait logique puisque je continue à consommer des films et que je n’estime pas (contrairement aux puristes) que la production cinématographique s’est considérablement dégradée ces dernières années (à part peut-être celle de Tim Burton, mais nul besoin d’être un spécialiste pour s’en apercevoir).

Mais alors qu’est-ce qui cloche, au juste ? Serais-je finalement complice du meurtre horrible, perpétué à petit feu sur l’industrie du cinéma, par le téléchargement, la sortie en dvd après trois mois seulement et le prêt en médiathèque (parfois outrageusement gratuit) ? Oh oui, ce ne peut être que ça… et certainement pas la faute d’Hollywood qui se paye nos fioles, de Franck Dubosc et consorts qui monopolisent (pour ne pas dire "massacrent") le doublage et de la 3D qui me donne mal au crâne.
Pour résumer donc, si je veux me faire une toile peinarde, je dois aménager mon emploi du temps (de ministre)…
1) Afin de pouvoir regarder autre chose que le vingt-cinquième épisode d’une comédie grasse qui fait les choux, eux aussi gras, d’acteurs démodés, de réalisateurs fatigués, de scénaristes et de producteurs paresseux.
2) Afin d'éviter comme la peste les doublage en VF foireux qui affuble une actrice, initialement talentueuse, d'une voix de hyène hystérique face à un prompteur.
3) Afin de m’épargner cette 3D magique dont on nous rebat les oreilles depuis quatre ans. Soit disant que c’est la plus belle invention du 7e art depuis la couleur et que ça vaut bien le coup de débourser cinq euros de plus, alors que le prix initial s’annonce déjà plus élevé que celui du dvd d’ici un an ou deux.

Allez, puisqu’on vous dit que c’est une révolution ! Venez-y donc vous démolir la rétine pendant trois heures et recevoir votre content de sang, de vaisseaux spatiaux et de coups de hache en pleine tête ! Emmenez-y donc votre gentille petite famille ! A raison de 15 euros par personnes, on atteindra facile les 60 euros de sortie dominicale. Pour un peu, ça ferait un super cadeau de Noël, à condition bien sûr, de ne pas se retrouver avec des places en première classe...

Mais quézaco, la place de ciné première classe ? Bon sang de bois, les amis ! N’ouvrez-vous donc jamais le Parisien ? (comme je vous comprends !) Ce matin, le journal régional le plus beauf du pays (oui, c’est une critique méchante et entièrement gratuite) nous fait l’honneur d’une Une qui va rebooster nos statistiques de prêts de dvds et donner encore plus de fil à retordre aux 70 employés d’Hadopi ! Pathé et Gaumont réinventent la première classe en proposant des fauteuils plus confortables, idéalement situés et bien évidemment plus chers. Moi qui rechignait à aller m’esquinter le dos devant Hapiness Therapy, me voilà comblée !

A vue de nez, la première classe représenterait un bon tiers de la salle, ce qui du même coup, devrait contraindre les spectateurs arrivés au dernier moment à débourser davantage pour pouvoir assister à Django Unchained. Alors vous je ne sais pas, mais personnellement, si on me dit : "Il ne reste plus que des places en première classe. Ça fera 19 euros, mon chaton, et n’oublie pas tes lunettes", je risque de mal le prendre et d’avoir subitement l’envie irrépressible d’envoyer péter l’industrie du cinéma et les bâtons qu’elle se met dans les roues, toute seule, comme une grande.

Comment peut-on incriminer le spectateur sur sa propension à télécharger illégalement alors qu’on augmente le prix des places d’année en année ? Comment peut-on ainsi attaquer la main qui nourrit alors qu’on découpe ouvertement, et surtout très vénalement, les quelques 400 pages de Bilbo le Hobbit en trois films de trois heures chacun ? Comment peut-on inventer toujours plus de stratagèmes, soit disant novateurs, pour traire encore et encore ces vaches à lait de consommateurs ? Comment peut-on se plaindre de la baisse considérable de fréquentation alors que les fans de Tarantino, imperturbables, font la queue jusqu'au bout de la rue ?
Oh, certainement une nuée de daltoniens déçus de ne pas pouvoir profiter de la ressortie de Titanic en 3D.

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